Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/313

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glaises aux rouges vifs, aux verts acides, représentaient des scènes de chasse. Un parfum rude, cuir de Russie, alcool de lavande et maryland, imprégnait cette chambre masculine, nette, sobre, claire, sans bibelots, sans fanfreluches, meublée de cuivres et de bois vernis…

Josanne aimait cette chambre, ces meubles, ce parfum. Elle aimait les objets maniés par Noël, ses vêtements, l’air qu’il respirait. Et, le regardant de coin, dans la glace un peu verdâtre, elle songeait avec délices : « Mon maître ! mon maître chéri !… Je n’ai pas d’autre volonté que la vôtre… Je ne suis qu’une chose, une très petite chose, dans vos chères mains. Que je sois votre égale respectée, devant le monde, devant votre raison et votre amitié, c’est notre désir à tous deux. Mais la rebelle s’est rebellée contre la société injuste, et non pas contre la nature ; elle ne s’est pas rebellée contre la loi éternelle de l’amour… Elle ne repousse point la tendre, joyeuse et noble servitude volontaire, qui n’humilie point, puisqu’elle est consentie. Vraiment, il me plaît de vous appeler « mon maître », parce que vous êtes fort, et clairvoyant, et bon ; parce que, si je peux vivre seule, sans votre secours, il m’est beaucoup plus agréable de vivre près de vous, avec votre aide… Et même — je ne l’avouerai jamais ! — il me plaît d’avoir peur de vous, — un peu, très peu ! — et de vous tenir quelquefois sous mon pied, si faible, comme une belle bête fauve que j’ai domptée, mais qui saurait rugir et qui me dévorerait, si j’étais méchante…

« Et cela ne m’empêche pas d’être féministe, et