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les services du journal, restait seule avec Bersier et mademoiselle Bon.

Pendant tout le mois d’août, Noël et Josanne promenèrent leur amour dans le beau Paris d’été. Josanne passait toutes ses heures libres dans le cabinet de travail où Noël ne travaillait guère. Le soir, ils erraient sous les arbres du Bois, autour des lacs…

Ils s’assirent un soir, près d’Armenonville, au croisement de trois sentiers. L’ombre, autour du banc, était si épaisse qu’ils ne distinguaient pas leurs visages. La lune, apparue entre les branches, les surprit tout à coup de sa lueur, — la lune ronde et rouge qui rôde, sorcière amoureuse, dans les bois peuplés d’amants.

Des couples venaient, par les trois sentiers, passaient, sans les voir, devant Noël et Josanne. Couples anonymes et tous pareils, la femme en robe claire et l’homme sombre, fuyant les feux électriques et la fête enragée des violons, ils cherchaient l’illusion des solitudes sauvages. La lune les attirait vers les carrefours déserts, les noirs taillis qu’elle emplissait de vapeurs argentées et de féeriques silences. Par toute la terre, à l’heure la plus douce de cette douce nuit, l’homme et la femme se rapprochaient dans un même besoin de tendresse et de caresse… Et Noël, qui d’abord avait souri, croyait entendre le grand soupir fait de mille soupirs, le vœu d’éternité qu’exhale le pauvre amour humain depuis la première nuit du monde…

« Vœu inlassable et toujours déçu ! pensa Noël ; l’amour passe, les amants meurent, mais des êtres sont nés de leur baiser. Ce qui pousse l’homme vers