Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/319

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— Pas maintenant, non.

Il fut blessé, et même un peu scandalisé.

— Tu crains de faire tort à Claude ?

Il sentit, plus qu’il ne vit, le regard de Josanne, ce regard d’inquiétude et de défi qu’il craignait.

— Faire tort à Claude, moi ?… J’ignore ce que j’éprouverais, si j’avais un autre enfant… De la joie, de la fierté, de la tendresse, assurément, mais cela ne modifierait pas mes sentiments pour Claude ?… Jamais, jamais…

Il avait espéré une autre réponse.

— Et puis, continua Josanne, cela dépendrait beaucoup de toi.

— De moi !

— Il y a en moi un instinct de compensation… Or tu ne peux pas aimer Claude, tu ne peux pas l’adopter, dans ton cœur, comme certains maris adoptent l’enfant de leur femme… Je sens, au fond de toi, une rancune qui persiste contre ce pauvre petit… Oh ! je ne te reproche rien !… Tu as un réel désir d’être bon et généreux, et tu n’es pas responsable d’une… antipathie.

— Antipathie !… Le mot est trop fort !

— Soit !… Il dépasse ma pensée… Disons… un sentiment pénible… C’est naturel !… Mais Claude non plus n’est pas responsable du mal qu’il te fait par sa présence, par son existence…

Elle murmura, d’une voix plus basse et voilée :

— C’est à cause de lui, surtout, que je ne peux pas t’épouser, maintenant…

Ils allèrent vers Armenonville. Bientôt les lumières parurent entre les arbres pressés du taillis. Un violon