Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/320

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chanta, seul, le thème d’une valse italienne travestie à la hongroise, et si déhanchée, si trépidante, si nerveuse et si langoureuse qu’on ne la reconnaissait plus. Des passants s’arrêtaient pour entendre… Mais qu’importaient à Noël la musique, la lune blanche, les couples enlacés, et tout l’amour épars sur le monde !

Josanne marchait près de lui. Elle disait parfois :

— Je t’en prie… ne va pas si vite…

Il ralentissait le pas, un instant, puis, malgré lui, il se hâtait… Josanne le rejoignit, lui prit le bras :

— Mon ami, je t’ai fait beaucoup de peine ?

— Beaucoup.

— Mais toutes les femmes me comprendraient…

— Allons donc !… Je me rappelle des paroles que tu as prononcées, un soir, à propos d’une fille de la Villa Bleue… « Il y a des femmes qui sont plus amantes que mères. Elles aiment dans l’enfant… le père de l’enfant… »

— Cela ne prouve rien… Il y a aussi des femmes qui aiment l’enfant pour lui-même, fût-il né d’un père haï ou méprisé…

— Parce qu’elles ont, dans les entrailles, l’aveugle instinct maternel… Et tu ne l’avais pas, toi, cet instinct !…

— Je ne l’avais pas, d’abord… Crois-tu que j’aie accepté avec joie la venue d’un enfant… dans les circonstances que tu sais ?… J’étais au désespoir… L’enfant est né… Et puis le sentiment maternel s’est développé, tellement, tellement !… Il s’est détaché de l’amour, du souvenir de l’amour… J’aime Claude pour lui-même…

Elle énuméra les raisons qu’ils avaient d’être heu-