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police, connaissait le nom de cette personne charmante. Il savait qu’elle était la femme d’un trésorier de la Monnaie, M. Le Normant, et qu’elle habitait le château d’Étiolles, propriété de son oncle par alliance, le fermier général Tournehem.

Très mal née et très bien élevée, douée de toutes les grâces et de tous les talents, elle vivait, en marge du vrai monde, dans une société composée de traitants, de parvenus, d’écrivains, d’artistes, de philosophes, où s’égaraient quelques grands seigneurs. On l’appelait « la beauté de Paris » et ses intimes la nommaient familièrement « Reinette ». À vingt et un ans accomplis, elle n’avait pas encore d’amant, et l’on prétendait qu’elle se gardait pour le Roi de France.

Le Roi de France aimait, autant qu’il pouvait aimer, la duchesse de Châteauroux, cette troisième des sœurs Nesle, qui lui avait fait oublier ses aînées, Mme de Mailly et Mme de Vintimille. Et n’eût-il pas aimé sa hautaine favorite qu’il ne fût pas descendu jusqu’à désirer une aussi petite bourgeoise que Mme Le Normant d’Étiolles, née Jeanne-Antoinette Poisson. Pourtant, il n’est pas désagréable à un voluptueux, même s’il est roi, d’émouvoir une très jolie femme. Louis XV avait