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la femme et son secret

civilisée comme chez la primitive, mais, en devenant un sentiment, il s’est à la fois enrichi et restreint ; et plus la femme s’élève par l’intelligence, s’affine, se cultive, se complique, plus le sentiment maternel se dégage de l’animalité. Ce n’est plus la quantité qui le contente, c’est la qualité des enfants. À la fatalité aveugle de l’instinct, il oppose la volonté du choix. La femme n’accepte plus de n’être qu’un ventre condamné aux travaux forcés de la reproduction.

Louis Ménard, philosophe mystique et païen, a écrit que « l’amour c’est un enfant qui veut naître ». L’amour civilisé laisse volontiers l’enfant dans les limbes pour quelques années. Tant que dure la passion, dans sa force souveraine, ceux qui l’éprouvent vivent en un monde fermé. Ils sont si heureux d’être deux qu’ils n’ont pas envie d’être trois. Le tiers détruirait une harmonie à peine créée. Il en créerait une autre, mais bien plus difficilement que s’il arrivait à l’heure favorable, lorsque l’égoïste et nécessaire ardeur s’apaiserait en une tendresse plus grave, lorsque l’amour, moins enivré, trouverait, dans