Page:Tinayre - La femme et son secret, 1933.pdf/199

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
197
l’héroïsme féminin

cier exécrable qui eut pourtant de l’esprit, semble avoir fortement exploité l’amour de Juliette. Elle n’a trouvé d’affection vraie que celle du décorateur Séchan, et de protection généreuse que celle d’Anatole Demidoff.

Le souvenir de cette éclatante figure va poursuivre Victor Hugo. Dans l’orage de sa vie secrète, l’« Oiseau de flamme » a brillé, splendide et fugitif. Quelques mois plus tard, le 2 janvier 1833, le poète retrouve Juliette à la Porte Saint-Martin, où commencent les répétitions de Lucrèce Borgia. Elle a un tout petit rôle : celui de la princesse Negroni, qui ne fait guère que traverser le drame. Le 2 février, première représentation. La princesse Negroni porte une robe qui voudrait être « Renaissance » et qui est bien « Restauration ». On peut la voir, cette robe, devenue un objet de musée, dans la maison de Victor Hugo, place des Vosges. C’est un damas, entre le rose sombre et le violet rougissant, broché de fleurs argentées. Cent années ont jeté leur cendre sur les reflets endormis aux plis de la soie, plumage éteint de l’oiseau mort. On pense à la jeune femme, dont le corps tiède et souple anima cette robe qui lui survit, tandis