Page:Tinayre - Notes d une voyageuse en Turquie.djvu/314

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
300
LA VIE AU HAREM

amoureuse… Ses malheurs conjugaux la hantent. Son aventure lui paraît inouïe, unique, digne de la plus vaste publicité.

« Écrivez, chère amie, reprend-elle dans un français hésitant, écrivez, pour publier…

» Je suis d’une grande famille ; mon père était un célèbre savant. Il m’a fait bien instruire, par une institutrice française. J’étais très pieuse, très bonne musulmane et j’adorais le Sultan comme une divinité. Quand j’ai commencé à lire philosophie, j’ai senti grands changements, mais toujours je crois en Allah, en Dieu… Je suis déiste, chère amie, tandis que cette dame de Salonique, elle ne croit à rien du tout… Très intelligente, cette dame ! elle ne sait pas lire, mais par la force de la réflexion, elle ne croit plus à rien du tout.

» J’ai étudié philosophie française dans Voltaire, Lamartine, Zola… Qu’avez-vous, chère amie ? Vous riez !… Vous ne trouvez pas que Zola grand philosophe ? Je ne l’aimais pas d’abord, parce qu’il découvre trop la nature… Plus tard, quand j’ai compris pro-