Page:Tinayre - Notes d une voyageuse en Turquie.djvu/74

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
60
JOURS DE BATAILLE

tiède prend la splendeur de l’été. En face, dans le jardin vide, les platanes ont déplié mille petits drapeaux vert tendre. Des pigeons gonflent leur col de soie grise. Des gens emportent un mort dans une sorte de brouette… Et les prisonniers arrivent toujours.

Vers trois heures, quand tout paraît calmé, quand les barrages sont rompus, on apprend que la bataille recommence à Tachkichla, au Taxim… On dit que les réactionnaires ont arboré le drapeau blanc et qu’ils ont pris entre deux feux, par traîtrise, les libéraux déjà entrés dans la cour du Taxim… Il y a eu beaucoup de morts, des représailles sanglantes…

Par le passage du Bon-Marché, je gagne la rue de Péra et l’ambassade de France. Elle est située tout à fait en contre-bas de la rue, et une descente très raide y donne accès. Là, des élèves de l’école militaire de Pancaldi, de tout jeunes gens vêtus de khaki, fraternisent avec les braves marins bretons du stationnaire Jeanne-Blanche.

Les beaux lilas du jardin, en pleine fleur, semblent un énorme bouquet blanc et mauve.