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Page:Tissot - Principes du droit public, 1872.djvu/56

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là pour ainsi dire la matière de l’État. La constitution quelle qu’elle soit — et un État en a toujours une — en est la forme. Mais cette forme n’est ni nécessairement ni toujours une charte, un document écrit.

Quoique le droit public ne soit établi qu’en vue des citoyens, mais parce qu’il est établi dans l’intérêt de tous les citoyens pris individuellement ou partiellement, le droit privé est subordonné au droit public, et les citoyens n’ont pas, en principe, la faculté d’y déroger[1], alors même qu’en cela ils ne feraient que renoncer à l’exercice de leur droit, par exemple si celui qui a été la victime d’un attentat voulait de son propre mouvement, ou par suite d’un arrangement privé, empêcher ou suspendre l’action de la justice publique. Il ne s’agit pas ici uniquement du droit du citoyen lésé, qui peut, il est vrai, saisir ou ne saisir pas d’une plainte l’autorité publique, mais l’ordre public y est aussi intéressé, qu’il y ait ou non un plaignant pour mettre la justice en mouvement. Autrement, il suffirait qu’un meurtre fût accompli sur la personne d’un citoyen dont nul ne se croirait intéressé à faire venger la mort pour que le crime restât de droit impuni. Ce qui est inadmissible dans tout État civilisé et bien policé.

II. Toute société civile n’est telle que parce qu’elle a sa forme, quelle que soit d’ailleurs cette forme, et quelle qu’en soit l’origine. Est-ce une raison de dire que l’existence de cette forme suffit à la légitimer,

  1. Jus publicum privatorum pactis immutari nequit, L. 38, Dig., de Pactis, 2, 12.