Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 1.djvu/197

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représentant de la démocratie ; leur but n’a point été non plus de donner dans la première un appui au pouvoir, en laissant à la seconde les intérêts et les passions du peuple.

Diviser la force législative, ralentir ainsi le mouvement des assemblées politiques, et créer un tribunal d’appel pour la révision des lois, tels sont les seuls avantages qui résultent de la constitution actuelle de deux chambres aux États-Unis.

Le temps et l’expérience ont fait connaître aux Américains que, réduite à ces avantages, la division des pouvoirs législatifs est encore une nécessité du premier ordre. Seule, parmi toutes les républiques unies, la Pensylvanie avait d’abord essayé d’établir une assemblée unique. Franklin lui-même, entraîné par les conséquences logiques du dogme de la souveraineté du peuple, avait concouru à cette mesure. On fut bientôt obligé de changer de loi et de constituer les deux chambres. Le principe de la division du pouvoir législatif reçut ainsi sa dernière consécration ; on peut donc désormais considérer comme une vérité démontrée la nécessité de partager l’action législative entre plusieurs corps. Cette théorie, à peu près ignorée des républiques antiques, introduite dans le monde presque au hasard, ainsi que la plupart des grandes vérités, méconnue de plusieurs peuples modernes, est enfin passée comme un axiome dans la science politique de nos jours.