Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 1.djvu/204

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de lui résister. Rien ne saurait l’arrêter dans sa voie, ni priviléges, ni immunité locale, ni influence personnelle, pas même l’autorité de la raison, car elle représente la majorité qui se prétend l’unique organe de la raison. Elle n’a donc d’autres limites, dans son action, que sa propre volonté. À côté d’elle, et sous sa main, se trouve placé le représentant du pouvoir exécutif, qui, à l’aide de la force matérielle, doit contraindre les mécontents à l’obéissance.

La faiblesse ne se rencontre que dans certains détails de l’action gouvernementale.

Les républiques américaines n’ont pas de force armée permanente pour comprimer les minorités ; mais les minorités n’y ont jamais été réduites, jusqu’à présent, à faire la guerre, et la nécessité d’une armée n’a pas encore été sentie. L’État se sert, le plus souvent, des fonctionnaires de la commune ou du comté pour agir sur les citoyens. Ainsi, par exemple, dans la Nouvelle-Angleterre, c’est l’assesseur de la commune qui répartit la taxe ; le percepteur de la commune la lève ; le caissier de la commune en fait parvenir le produit au trésor public, et les réclamations qui s’élèvent sont soumises aux tribunaux ordinaires. Une semblable manière de percevoir l’impôt est lente, embarrassée ; elle entraverait à chaque moment la marche d’un gouvernement qui aurait de grands besoins pécuniaires. En général, on doit désirer que, pour tout ce qui est essentiel à sa vie, le gouvernement ait des fonctionnaires à lui, choisis par lui, révocables par lui, et des formes rapides