Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 3.djvu/442

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La guerre cependant est un accident auquel tous les peuples sont sujets, les peuples démocratiques aussi bien que les autres. Quel que soit le goût que ces nations aient pour la paix, il faut bien qu'elles se tiennent prêtes à repousser la guerre ou, en d'autres termes, qu'elles aient une armée.

La fortune qui a fait des choses si particulières en faveur des habitants des États-Unis, les a placés au milieu d'un désert où ils n'ont, pour ainsi dire, pas de voisins. Quelques milliers de soldats leur suffisent, mais ceci est américain et point démocratique.

L'égalité des conditions, et les mœurs ainsi que les institutions qui en dérivent, ne soustraient pas un peuple démocratique à l'obligation d'entretenir des armées, et ses armées exercent toujours une très-grande influence sur son sort. Il importe donc singulièrement de rechercher quels sont les instincts naturels de ceux qui les composent.

Chez les peuples aristocratiques, chez ceux surtout où la naissance règle seule le rang, l'inégalité se retrouve dans l'armée comme dans la nation ; l'officier est le noble, le soldat est le serf. L'un est nécessairement appelé à commander, l'autre à obéir. Dans les armées aristocratiques, l'ambition du soldat a donc des bornes très-étroites.

Celle des officiers n'est pas non plus illimitée.

Un corps aristocratique ne fait pas seulement partie d'une hiérarchie ; il contient toujours une hiérarchie dans son sein ; les membres qui la composent sont placés