Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 3.djvu/566

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pareils dangers n’est point dans l’armée, mais dans le pays. Un peuple démocratique qui conserve des mœurs viriles trouvera toujours au besoin dans ses soldats des mœurs guerrières.


PAGE 479.


Les hommes mettent la grandeur de l’idée d’unité dans les moyens, Dieu dans la fin ; de là vient que cette idée de grandeur nous mène à mille petitesses. Forcer tous les hommes à marcher de la même marche, vers le même objet, voilà une idée humaine. Introduire une variété infinie dans les actes, mais les combiner de manière à ce que tous ces actes conduisent par mille voies diverses vers l’accomplissement d’un grand dessein, voilà une idée divine.

L’idée humaine de l’unité est presque toujours stérile, celle de Dieu immensément féconde. Les hommes croient témoigner de leur grandeur en simplifiant le moyen ; c’est l’objet de Dieu qui est simple, ses moyens varient à l’infini.


PAGE 485.


Un peuple démocratique n’est pas seulement porté par ses goûts à centraliser le pouvoir ; les passions de tous ceux qui le conduisent l’y poussent sans cesse.

On peut aisément prévoir que presque tous les citoyens ambitieux et capables que renferme un pays démocratique travailleront sans relâche à étendre les attributions du pouvoir social, parce que tous espèrent le diriger un jour. C’est perdre son temps que de vouloir prouver à ceux-là que l’extrême centralisation peut être nuisible à l’État, puisqu’ils centralisent pour eux-mêmes.

Parmi les hommes publics des démocraties, il n’y a guère que des gens très-désintéressés ou très-médiocres qui veuillent décentraliser le pouvoir. Les uns sont rares et les autres impuissants.


PAGE 519.


Je me suis souvent demandé ce qu’il arriverait si, au milieu de la mollesse des mœurs démocratiques et par suite de l’esprit inquiet