Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 9.djvu/12

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quel est l’opuscule de Tocqueville, si petit qu’il soit, qui ne contienne quelque vive lumière, quelque idée générale et féconde ?

Mais ce qui m’a surtout frappé dans les œuvres que renferme ce volume, c’est l’utilité pratique et actuelle dont la plupart d’entre elles peuvent être pour les contemporains.

J’en vais citer deux exemples que j’emprunte non à la politique proprement dite dont le terrain serait trop brûlant, mais à l’économie politique, qui exclut la passion sans supprimer l’intérêt.

Et d’abord la question pénitentiaire : — qui aujourd’hui sait bien cette question ? Il est dans la nature de la démocratie d’oublier vite : les hommes changent, les traditions se perdent ; il faut recommencer sans cesse les études et les expériences déjà faites. Cette question des prisons et de leur réforme, on la savait parfaitement, il y a vingt ans, on l’a à peu près oubliée aujourd’hui. Cependant il va bien falloir la rapprendre et l’étudier ; car elle se pose de nouveau dans les termes les plus redoutables. La population de malfaiteurs qui remplit les prisons et menace la société redevient pour tous les honnêtes gens une cause d’effroi, et pour les gouvernants un sujet de sollicitude. Comment concilier le mode de répression sévère que la sécurité publique réclame, avec les sentiments d’humanité que cette répression blesserait peut-être ? On reconnaît que les détenus, s’ils sont confondus pêle-mêle, se corrompent les uns les autres et deviennent ainsi, par le contact mutuel, des ennemis plus dan-