vent quelquefois ainsi jusqu’à être impitoyables par une sorte de vertu ; cependant ils ne sont pas insensibles aux maux qu’ils causent. Mais ils aiment à se figurer que la grandeur de l’État finit toujours par résulter de la grandeur du prince ; ils se plaisent à croire que le bonheur de ses sujets dépend de l’exercice incontesté de sa pleine puissance, et ils mettent du patriotisme à bien tenir leur pays dans l’ordre et dans l’obéissance où ils sont eux-mêmes.
M. de Cessac était un rejeton de cette famille. Il lui appartenait par son esprit, ses penchants, ses qualités, ses défauts ; la nature lui avait clairement assigné son rôle. Le théâtre seul lui avait manqué ; l’Empire le lui fournit.
La révolution, en poursuivant son cours, avait achevé de tout détruire. Elle n’avait encore rien pu créer. Le désordre et la faiblesse étaient partout. Personne ne savait plus ni commander ni obéir, et l’on se croyait sur le point de recueillir les derniers soupirs du corps social.
Napoléon paraît à ce moment suprême. Il ramasse à la hâte et place dans ses mains tous les fragments dispersés du pouvoir, constitue une administration, forme une justice, organise sur un seul et même plan la législation civile aussi bien que la législation politique ; il tire, en un mot, de dessous les ruines que la révolution avait faites, une société nouvelle, mieux liée et plus forte que l’ancienne société détruite, et l’offre tout à coup aux regards de la France, qui ne se reconnaissait plus elle-même.