Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 9.djvu/381

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de désordre, et de placer le condamné dans une situation nouvelle qui lui permette de mettre à profit la leçon que l’emprisonnement lui a donnée.

La Commission, messieurs, n’a pas cru devoir discuter cette opinion, non qu’elle ne la crùt très-digne d’attention, mais elle a jugé qu’en se livrant à un pareil travail, elle sortirait du cercle naturel de ses pouvoirs. Le système de la déportation, lors même qu’on ne l’applique que par exception et à un petit nombre de condamnés, constitue encore une innovation trop considérable pour qu’on puisse le discuter accidentellement et l’admettre sans un long et spécial examen. Ce système ne peut manquer, en effet, de réagir sur l’économie du code pénal ; il soulève des questions de haute administration et de politique proprement dite. La Chambre n’est saisie de rien de semblable. La Commission n’a été chargée que d’examiner un projet relatif aux prisons, et c’est à l’étude de cette seule matière qu’elle doit borner son travail.

Ayant ainsi réglé tout ce qui concernait les prisons ordinaires, la Commission a dû s’occuper des maisons spéciales destinées aux jeunes délinquants. Le projet du gouvernement indique d’une manière générale que des maisons spéciales seront affectées aux enfants condamnés en vertu des articles 67 et 69 du code pénal, et aux enfants détenus, soit en vertu de l’article 66 du même code, soit par voie de correction paternelle.

La Commission a admis à l’unanimité le même principe. Une maison de jeunes détenus doit être soumise à un régime tout différent et conduite par d’autres principes qu’une prison d’adultes. Il faut dans l’homme qui la dirige des qualités particulières. Il est donc à désirer non-seulement qu’il y ait des quartiers séparés pour les jeunes détenus, mais encore des maisons spéciales. Cependant, la Commission approuve le gouvernement de n’avoir pas voulu faire de cette dernière prescription une règle absolue.

On comprend, en effet, que le nombre des enfants détenus, en vertu des différents articles dont on vient de parler, n’excédant pas en ce moment deux mille pour toute la France, le nombre des maisons qui leur sont destinées, doit être fort petit, et que ces maisons devront être fort éloignées les unes des autres.

Or, le jeune délinquant peut être condamné à une peine dont la durée soit courte. Dans ce cas, ce serait faire une dépense inu-