Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol11.djvu/384

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zov recevait presque un blâme de l’empereur pour avoir fait passer son armée par la route de Riazan, et on lui désignait cette même position en face de Kalouga, où il était déjà quand il reçut la lettre de l’empereur.

L’armée russe qui marchait sous l’impulsion des chocs reçus pendant toute la campagne et surtout à Borodino, après l’anéantissement de la force du choc, ne recevant pas de nouvelle poussée, prit la position qui lui était naturelle.

Le mérite de Koutouzov ne fut pas en des manœuvres géniales, qu’on appelle stratégiques, mais en ce que lui seul comprit l’importance de l’événement qui s’accomplissait. Lui seul comprit l’importance de l’inaction de l’armée française, lui seul continua d’affirmer que la bataille de Borodino était la victoire ; lui seul — lui qui par sa situation de commandant en chef aurait dû, semble-t-il, provoquer l’attaque — lui seul employa toutes ses forces à préserver l’armée russe de batailles inutiles.

La bête blessée sous Borodino était couchée là-bas, quelque part, où le chasseur la laissait, mais était-elle vivante, forte, ou seulement se cachait-elle, le chasseur l’ignorait. Tout à coup on entendit ses gémissements.

Les gémissements de l’armée française blessée, les cris dénonçant sa perte, ce fut l’envoi de Lauriston au camp de Koutouzov avec la mission de demander la paix.