Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol13.djvu/341

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Pendant la classe de dessin, le maître, un nouveau, remarqua un garçon qui criait, n’écoutait pas et, sans aucune raison, battait ses voisins. N’ayant pu venir à bout de lui par les paroles, le maître le fit sortir de sa place et prit son ardoise. Ce fut la punition. Tout le temps de la leçon, le gamin pleura à chaudes larmes. C’était ce même garçon que je n’avais pas voulu accepter à l’ouverture de l’école de Iasnaïa-Poliana, le trouvant idiot. L’idiotie et la timidité étaient ses traits principaux, ses camarades ne l’admettaient jamais dans leurs jeux ; ils se moquaient de lui, et eux-mêmes étonnés de lui disaient : « Comme il est drôle ce Petka : on le bat, même les petits le battent, et il se secoue et s’en va. » — « Il n’a pas de cœur », me dit de lui un enfant. Si l’on a pu amener un pareil garçon à la rage pour laquelle il fut puni par le maître, alors, certainement, ce n’est pas lui le coupable.

Voici le second cas.

L’été, pendant qu’on réparait la maison, la bouteille de Leyde disparut du cabinet de physique ; puis, à diverses reprises, alors qu’il n’y avait plus ni menuisiers ni peintres à la maison, des crayons et des livres disparurent. Nous interrogeâmes les enfants ; les meilleurs élèves, nos vieux amis, rougirent et devinrent si timides qu’un juge d’instruction aurait vu là la preuve éclatante de leur culpabilité. Mais je les connaissais et pouvais