Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol13.djvu/355

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coup. Nous nous tûmes. Nous n’entendîmes rien, cependant la crainte augmenta. — « Eh bien ! Que ferons-nous s’il bondit et court après nous ? » demanda Fedka. Nous nous mîmes à parler des brigands du Caucase. Ils se rappelèrent l’histoire du Caucase que je leur avais racontée longtemps auparavant, et, de nouveau, je me mis à leur parler des Abreks, des Cosaques, de Hadji-Mourad.

Siomka marchait en avant, il écartait largement ses grandes bottes et balançait son large dos. Pronka voulait aller à côté de moi mais Fedka le poussa de côté, et Pronka, qui, vu sa pauvreté, se soumettait toujours à tout le monde, aux passages les plus intéressants seulement, courait de mon côté en s’enfonçant dans la neige jusqu’aux genoux.

Quiconque a observé les enfants des paysans a remarqué qu’ils ne sont pas habitués aux caresses, aux paroles tendres et qu’ils les détestent. J’ai eu l’occasion de voir la chose suivante : Une dame qui visitait l’école des paysans, voulant se montrer tendre envers un enfant, lui dit : — « Eh bien ! mon chéri, viens que je t’embrasse ! » Elle l’embrassa et l’enfant s’en montra honteux, confus et offensé. Un enfant de cinq ans est déjà au-dessus de ces cajoleries, c’est un grand garçon. C’est pourquoi je fus particulièrement frappé quand Fedka, qui marchait à côté de moi, au passage le plus saisissant du récit, tout à coup, frôla sa manche contre ma main, puis me saisit deux doigts et ensuite ne les