Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol16.djvu/421

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guidait sa vie, annihilait sa volonté et le contraignait à modifier ses relations avec sa femme.

Il voyait clairement que tout le monde et sa femme exigeaient de lui une chose qu’il ne pouvait parvenir à comprendre, et cela, il le sentait, soulevait en son âme un sentiment de colère qui détruisait son calme et tout le mérite de sa victoire sur lui-même. Il avait pensé qu’il serait mieux pour Anna de rompre avec Vronskï, mais si l’avis général était contraire à cette rupture, il était prêt à admettre de nouveau ces relations, pourvu seulement que la honte n’en rejaillit pas sur les enfants, qu’il n’en fût pas privé et que sa propre existence n’en fût pas bouleversée. Quelque mal que ce pût être, c’était, cependant, préférable à la rupture qui mettrait Anna dans une situation honteuse et sans issue, et le priverait, lui, de tout ce qu’il aimait. Mais il sentait son impuissance dans cette lutte. Il sentait d’avance tout le monde contre lui ; il se rendait compte qu’on ne lui permettrait pas de faire ce qui lui semblait maintenant si naturel et si bien, mais qu’on lui ferait un devoir de ce que lui considérait comme le mal.