Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol17.djvu/20

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quelle éducation pourrez-vous donner à vos enfants si vous ne réussissez pas à vaincre en vous les tentations du démon qui vous incitent à l’incrédulité ? dit-il d’un ton de doux reproche. Si vous aimez vos enfants en bon père, vous ne souhaiterez pas uniquement pour eux la richesse, le luxe et les honneurs, mais aussi leur salut : vous voudrez voir luire en eux la lumière de la vérité. N’est-il pas vrai ? Que répondrez-vous à l’enfant innocent qui vous demandera : « Père, qui est-ce qui a créé tout ce qui m’enchante en ce monde : la terre, les eaux, le soleil, les fleurs, les herbes ? » Lui direz-vous : « Je ne sais pas» ? Vous ne pouvez l’ignorer, parce que Dieu, dans sa grande bonté, vous l’a révélé. Et si votre enfant vous demande : « Qu’est-ce qui nous attend après cette vie ? » que lui direz-vous si vous ne savez rien ? Comment lui répondrez-vous ? L’abandonnerez-vous aux séductions du monde et de Satan ? Ce n’est pas bien ? dit-il ; et il s’arrêta, inclinant la tête de côté et regardant Lévine de ses yeux bons et doux.

Lévine ne répondit rien. Non qu’il craignît de discuter avec le prêtre, mais parce que personne encore ne lui avait posé de pareilles questions, et que d’ici que ses enfants fussent en âge de les lui faire, il sentait qu’il aurait le temps de réfléchir à la réponse.

— Vous abordez une phase de la vie où il faut choisir sa voie et s’y tenir, reprit le prêtre. Priez