Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol17.djvu/450

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qui me donnait trois mille roubles par an ; maintenant je travaille davantage, et je m’estime heureux si j’ai mes cinq pour cent… et mon travail n’est pas rétribué.

— Pourquoi le faites-vous, alors ? si c’est une perte sûre.

— Oui, pourquoi ? Que voulez-vous ? c’est par habitude, et on sait qu’il le faut. Je vous dirai plus, continua le propriétaire s’appuyant contre la fenêtre : mon fils n’a aucun goût pour l’agriculture, ce sera un savant, de sorte qu’il n’y aura personne après moi, pour continuer… Et malgré tout je m’obstine. Tenez, cette année, j’ai même planté un jardin.

— Oui, oui, dit Lévine, c’est tout à fait juste. On dirait que nous sentons un devoir à remplir envers la terre… Ainsi moi, à mon exploitation, je ne trouve pas mon compte, cependant, je continue de m’en occuper.

— J’ai un marchand pour voisin, continua le propriétaire ; l’autre jour il est venu me faire visite ; nous avons parcouru le domaine, puis le jardin, et ensuite il m’a dit : Chez vous, Stépan Vassiliévitch, tout est en très bon ordre, mais le jardin est un peu négligé — et mon jardin est très bien tenu. — À votre place, je ferais couper ces tilleuls, vous en avez un millier, chacun d’eux vous donnerait deux bonnes planches, et le bois de tilleul a de la valeur.