Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol21.djvu/354

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d’autre femme et abandonner la sienne, parceque, l’abandonnant, il la pousse au mal ainsi que celui qui s’unit à elle et alors il n’y a pas de limite au mal.

Reuss trouve de nouveau que ces versets ne sont pas à leur place, et il dit[1] :

Ici encore le rédacteur intercale quelques sentences intimement liées entre elles, que l’on retrouve ailleurs, dans d’autres contextes, et dont la première pouvait paraître à sa place après ce qui venait d’être dit du péché commis, ou se manifestant par un simple regard. La combinaison se fait facilement dans ce sens. Il vaudrait mieux être aveugle que de se laisser entraîner à des pensées, éventuellement à des actes, coupables et conduisant à la perdition éternelle.

Cependant nous concevons des doutes très sérieux au sujet de ces sentences qui ne nous paraissent pas du tout être à leur place ici. D’abord on ne voit réellement pas ce que la seconde formule (qui parle de la main droite) doit apporter de lumière à la pensée principale.

En second lieu, la mention expresse de l’œil droit, écarte complètement la seule association possible des idées, un homme borgne étant absolument dans la même position qu’un homme qui a ses deux yeux, dans les circonstances mentionnées ; enfin il est de fait que le manque de l’un de ses membres ne change pas les instincts vicieux de l’homme. Il y a même à objecter que le parallélisme du langage figuré compromet l’idée morale elle-même : Plutôt perdre un membre que le corps entier, plutôt renoncer à quelque chose de moins grand, moins nécessaire que de perdre tout. Avec ce parallélisme le péché serait, à vrai dire, représenté comme quelque chose de relativement inférieur, tandis qu’il est absolument mauvais. Nous verrons que

  1. P. 208.