Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol26.djvu/84

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La vue de cette femme me toucha, mais pas du tout comme je l’avais été à la maison de Liapine. Là-bas, la pitié pour ces hommes m’avait aussitôt rendu honteux, et ici j’étais content d’avoir enfin trouvé ce que je cherchais : une personne affamée.

Je lui donnai un rouble et je me souviens que j’étais très heureux que les autres le vissent. La vieille, voyant cela me demanda aussi de l’argent. Ce m’était si agréable de donner, que sans distinguer s’il fallait donner ou non, je donnai aussi à la vieille. Elle m’accompagna jusqu’à la porte et les gens qui étaient dans le corridor l’entendirent me remercier. Il est probable que mes questions sur la pauvreté excitaient l’attention car beaucoup marchaient derrière nous. Dans le corridor, plusieurs se mirent à me demander de l’argent. Parmi les quémandeurs, il y avait des ivrognes qui excitaient en moi des sentiments désagréables, mais du moment que j’avais donné à la vieille, je n’avais plus le droit de refuser à ceux-ci, et me mis à faire une distribution. Pendant que je distribuais, d’autres, et encore d’autres s’approchaient ; dans tous les logements on était à l’envers. Dans l’escalier et sur la galerie se montraient des gens qui me suivaient. Quand je sortis sur la cour, d’un des escaliers, un gamin descendit rapidement et écarta les gens. Il ne me voyait pas et prononçait rapidement : « Il a donné un rouble à Agachka ! » Arrivé en bas, le gamin se