Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol37.djvu/84

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Des affaires, mon cher ! Des affaires de tutelle. Car je suis tuteur ! J’administre les biens de Samanov. Tu le connais, ce richard ? Il est ramolli, et possède cinquante-quatre mille déciatines de terre ! ajouta-t-il avec fierté, comme s’il eût acquis lui-même toutes ces déciatines. Tout était dans un désordre épouvantable ! Toute la terre aux paysans, et ils ne payaient rien. Il y avait plus de quatre-vingt mille roubles d’arriéré. Eh bien ! en un an, j’ai changé tout cela ; et j’ai augmenté les revenus de 70 pour 100. Hein ? dit-il avec fierté.

Nekhludov se souvint alors d’avoir entendu dire que ce même Schenbok, qui lui-même avait dilapidé sa fortune et était criblé de dettes, grâce à quelque protection particulière, avait été choisi comme tuteur pour administrer la fortune d’un vieux richard, qui en avait dissipé une partie. Évidemment Schenbok vivait maintenant de cette tutelle.

« Comment me défaire de lui sans le froisser ? » se demandait Nekhludov, en regardant ce visage luisant, aviné, aux moustaches enduites de cosmétique, et en écoutant son bavardage de camarade bon enfant soucieux de bonne chère, et sa vantardise dans les affaires de tutelle.

— Eh bien ! alors, où dînons-nous ?

— C’est que je n’ai pas un moment, dit Nekhludov en regardant sa montre.