Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol4.djvu/114

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dant une demi-heure, les embuscades auraient été reprises, et qu’il avait répondu : Monsieur ! je ne dis pas non, pour ne pas vous donner un démenti. Et comme il a bien dit cela ! etc.

En réalité, bien qu’il eût été présent à l’armistice, il ne parvint pas à dire rien de particulier, bien qu’il voulût beaucoup causer aux Français. (C’est donc bien gai de parler avec des Français.) Le junker, baron Pest, marchait longtemps dans la ligne et demandait tout le temps aux Français qui étaient près de lui : De quel régiment êtes-vous ? On lui répondait et rien de plus. Quand il s’avançait trop derrière la ligne, alors la sentinelle française, qui ne s’imaginait pas que ces soldats comprenaient le français, l’injuriait à la troisième personne : Il vient regarder nos travaux, ce sacré… disait-il, grâce à quoi ne trouvant plus d’amusement à l’armistice, le junker baron Pest revenait à la maison, et, déjà en route, inventait les phrases françaises qu’il débitait maintenant !

Sur le boulevard se trouvait le capitaine Zobov qui causait très haut, le capitaine Objogov, tout déchiré et le capitaine d’artillerie qui ne cherchait personne, le junker heureux en amour, et toutes les mêmes personnes que la veille, avec leurs mêmes mobiles éternels. Il ne manquait que Praskoukhine, Neferdov et quelques autres, auxquels ici on pensait à peine, bien que leurs cadavres ne fussent pas encore lavés, arrangés, mis en terre.