Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol7.djvu/35

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

rendez-vous avec mademoiselle George, s’était rencontré chez elle avec Bonaparte, qui jouissait aussi des faveurs de la célèbre actrice ; et, dans cette rencontre, Napoléon avait été pris par hasard d’une de ces crises auxquelles il était sujet et ainsi, s’était trouvé à la merci du duc ; le duc n’avait pas profité de cet avantage, et, dans la suite, Bonaparte, précisément pour cette magnanimité, s’était vengé du duc en le faisant tuer.

Le récit était très joli et intéressant surtout à cet endroit où les deux rivaux se rencontrent tout à coup ; les dames semblèrent émues. Charmant ! dit Anna Pavlovna, en regardant interrogativement la petite princesse. Charmant ! chuchota la petite princesse en piquant l’aiguille dans son ouvrage, montrant ainsi que l’intérêt et le charme du récit, l’empêchaient de continuer de travailler. Le vicomte apprécia cette louange silencieuse et en souriant avec reconnaissance, il continua. Mais à ce moment, Anna Pavlovna, qui regardait toujours le jeune homme terrible, remarquant qu’il parlait trop haut et avec trop de feu à l’abbé, se hâta d’aller porter secours à l’endroit dangereux. En effet, Pierre avait réussi à nouer conversation avec l’abbé sur l’équilibre politique, et l’abbé, visiblement intéressé par l’ardeur sincère du jeune homme, développait devant lui son idée favorite. Tous deux écoutaient et parlaient avec trop d’a-