Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol27.djvu/121

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le cœur l’amour et la pitié pour les autres, commettent eux-mêmes de terribles cruautés sans savoir ni pourquoi ni dans quel but. Nos hommes russes, doux, bons, pénétrés de l’esprit de la doctrine chrétienne, des hommes pleins de regrets d’avoir blessé leur prochain par des paroles, de n’avoir pas partagé leurs biens avec les mendiants, de n’avoir pas plaint les prisonniers, ces hommes passent les meilleures années de leur vie dans le crime, torturent leurs frères, et non seulement ne se repentent pas de ces actes, mais considèrent la guerre comme une nécessité aussi inéluctable que de manger et respirer. N’est-ce pas le devoir de chacun de faire tout ce qu’il peut pour la guérir, et premièrement et principalement de la découvrir, de l’avouer et de l’appeler de son vrai nom. Le vieux soldat a passé toute sa vie à torturer et à massacrer d’autres hommes, et nous disons : pourquoi le lui rappeler ? Le soldat ne se croit pas coupable et ces choses terribles : bâtons, verges et le reste sont déjà passées ; pourquoi rappeler les vieilles choses ? maintenant il n’existe plus rien de tout cela. Il y a eu Nicolas Palkine, pourquoi en parler ; seul le vieux soldat s’en souvient avant de mourir ; pourquoi agacer le peuple ?

Au temps de Nicolas, on a dit la même chose d’Alexandre ; au temps d’Alexandre, la même chose de Paul ; au temps de Paul, la même chose de Catherine, des fureurs de sa dépravation, de