Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 1.djvu/359

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d’une situation aussi absurde ? » Et maintenant que le malheur était à sa propre porte, non seulement il ne songeait pas à se dégager de cette situation, mais il ne voulait pas l’admettre, et cela parce qu’il s’épouvantait de ce qu’elle lui offrait de terrible, de contre nature.

Depuis son retour de l’étranger, Alexis Alexandrovitch était allé deux fois retrouver sa femme à la campagne ; une fois pour dîner, l’autre pour y passer la soirée avec du monde, sans coucher, comme il le faisait les années précédentes.

Le jour des courses avait été pour lui un jour très rempli ; cependant, en faisant le programme de sa journée le matin, il s’était décidé à aller à Péterhof après avoir dîné de bonne heure, et de là aux courses, où devait se trouver la cour, et où il était convenable de se montrer. Par convenance aussi, il avait résolu d’aller chaque semaine chez sa femme ; c’était d’ailleurs le quinze du mois, et il était de règle de lui remettre à cette date l’argent nécessaire à la dépense de la maison.

Tout cela avait été décidé avec la force de volonté qu’il possédait, et sans qu’il permît à sa pensée d’aller au delà.

Sa matinée s’était trouvée très affairée ; la veille, il avait reçu une brochure d’un voyageur célèbre par ses voyages en Chine, accompagnée d’un mot de la comtesse Lydie, le priant de recevoir ce voyageur qui lui semblait, pour plusieurs raisons, être un homme utile et intéressant.