Page:Tolstoï - Dernières Paroles.djvu/256

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Chacun de nous envisage le monde et son principe à travers cette petite fenêtre qu’il s’est ouverte lui-même ou qu’il a choisie volontairement. Aussi peut-il arriver que l’homme qui voit confusément et dont la petite fenêtre n’est pas claire, de lui-même, par sa propre volonté, s’approche de la fenêtre d’un autre. Mais appeler à une autre fenêtre celui qui est satisfait de ce qu’il voit à la sienne c’est tout à fait déraisonnable, au moins impoli. Nous tous voyons le même Dieu. Nous tous vivons par Sa volonté, et nous pouvons en Le regardant de divers côtés, remplir Sa loi générale, de s’aimer les uns les autres, malgré les différences de notre rapport envers lui…

(Extrait d’une lettre à M. X… Mars 1903.)


§


6 mai 1903[1].

L’horrible crime commis à Kichinev m’a frappé maladivement, j’ai exprimé ce que je pense

  1. Cette lettre fut écrite par le comte Léon Tolstoï en réponse à l’invitation qui lui avait été faite de participer à un recueil littéraire au profit des victimes de Kichinev.
    Ajoutons, à propos des événements de Kichinev, que L. Tolstoï a reçu du North American Newspaper le télégramme suivant : « La Russie est-elle coupable dans le massacre de Kichinev ? Réponse payée trente mots.»
    Léon Tolstoï a répondu : « Le gouvernement est coupable. 1o En privant les Juifs des droits communs, comme une caste à part ; et 2o en instruisant par force le peuple russe dans l’idolâtrie au lieu du christianisme. »