Page:Tolstoï - Dernières Paroles.djvu/308

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ne se fâcheront plus les uns avec les autres à cause des soucis de la vie qui, à chaque instant, peut cesser ; ils ne gâteront plus les heures de la vie qui leur sont destinées. »

Mais ce fut autrement. Quand Dieu retourna voir comment vivaient les hommes, il s’aperçut que leur vie ne s’était pas améliorée.

Les plus forts, profitant de ce que les hommes pouvaient mourir en n’importe quel moment, subjuguaient les plus faibles, en tuaient quelques-uns et menaçaient de mort les autres. Il en résultait que les forts et leurs héritiers ne travaillaient pas du tout et s’ennuyaient dans l’oisiveté, que les faibles travaillaient au delà de leurs forces et s’ennuyaient parce qu’ils n’avaient pas de repos. Et les uns et les autres se craignaient et se haïssaient mutuellement. Et la vie des hommes était encore plus malheureuse.

Voyant cela, Dieu, pour y remédier, résolut d’employer le dernier moyen : il envoya aux hommes des maladies de toutes sortes.

Dieu pensait que si tous les hommes étaient soumis aux maladies, ils comprendraient que les forts doivent avoir pitié des malades et les soulager, afin d’être, à leur tour, secourus par les faibles, quand ils seraient malades.

Et de nouveau Dieu abandonna les hommes à eux-mêmes. Mais quand il retourna pour voir