Page:Tolstoï - Le Faux Coupon et autres contes.djvu/46

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que le coupable est l’un de vous, alors mieux vaut pour lui se repentir que de celer sa faute.

En prononçant ces paroles, le père Mikhaïl regardait fixement Mitia Smokovnikoff. Les lycéens, suivant son regard, se tournèrent aussi vers Smokovnikoff. Mitia rougit, devint en sueur, enfin se mit à pleurer et quitta la classe.

La mère de Mitia, ayant appris cela, amena son fils à lui tout avouer, et, aussitôt, courut au magasin d’accessoires pour photographie. Elle paya les douze roubles cinquante à la patronne et lui fit promettre de tenir secret le nom du lycéen ; quant à son fils, elle lui ordonna de nier tout, et, en aucun cas, de n’avouer à son père.

En effet, quand Fédor Mikhaïlovitch apprit ce qui s’était passé au lycée, et que son fils, appelé par lui, eut nié tout, il se rendit chez le proviseur, lui raconta ce qui s’était passé, lui déclara que l’acte de l’aumônier était inqualifiable et qu’il ne le laisserait pas passer ainsi. Le proviseur fit appeler l’aumônier, et entre lui et Fédor Mikhaïlovitch eut lieu une très violente explication.

— Une femme stupide a calomnié mon fils, du reste, elle-même a ensuite retiré ses propos, et vous n’avez trouvé rien de mieux que de calomnier un garçon honnête, sincère !…

— Je ne l’ai pas calomnié, et je ne vous permettrai pas de parler ainsi… Vous oubliez l’habit que je porte…

— Je m’en moque de votre habit !

— Vos opinions subversives sont connues de toute la ville…, dit le prêtre, dont le menton, en tremblant, faisait remuer la barbiche.

— Messieurs !… Mon père !… prononçait le