Page:Tolstoï - Le Faux Coupon et autres contes.djvu/49

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paille, et, tout en sifflotant et chantant il regardait si les enfants n’avaient pas pris quelque part des pommes. Vassili était un maître en fait de chansons. Il avait une belle voix. Des femmes, des jeunes filles, venaient de la campagne chercher des pommes. Vassili plaisantait avec elles. À celles qui lui plaisaient il donnait plus ou moins de pommes en échange d’œufs ou de kopecks, puis se recouchait. Il ne se levait que pour aller déjeuner, dîner ou souper. Il n’avait qu’une seule chemise, en indienne rose, et encore toute trouée. Ses pieds étaient complètement nus, mais son corps était robuste, sain, et quand on retirait du feu le pot de kacha, Vassili en mangeait pour trois, ce qui faisait l’admiration du vieux gardien. Durant la nuit, Vassili ne dormait pas ; il sifflotait ou poussait des cris aigus ; et, dans l’obscurité, il voyait très loin, comme un chat.

Une fois des garçons vinrent de la ville pour voler des pommes. Vassili s’approcha à pas de loup et se jeta sur eux. Ils essayèrent de le renverser, mais ce fut lui le plus fort ; tous s’enfuirent, sauf un qu’il retint, amena dans la hutte et remit au patron.

La première hutte qu’avait eue Vassili était dans le jardin, plus loin ; la deuxième, quand les poires furent enlevées, était à quarante pas de la maison du maître. Dans cette hutte Vassili était encore plus gai. Toute la journée il voyait comment les messieurs et les demoiselles s’amusaient, allaient se promener le soir et la nuit, jouaient du piano, du violon, chantaient, dansaient. Il voyait comment les demoiselles, assises sur le rebord des fenêtres avec des étudiants, fleuretaient avec eux, et, ensuite, allaient se promener par couples dans