Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/248

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— Rien. »

Tous les sujets sont obligés de payer l’impôt et tous le payent. Mais un homme à Kharkov, un autre à Tver, un troisième à Samara, refusent tous pour le même motif. L’un dit qu’il ne payera que lorsqu’on lui aura dit à quoi est destiné l’argent qu’on lui demande. Si c’est pour de bonnes actions, il donnera de lui-même et plus qu’on ne lui demande. Si c’est pour de mauvaises actions, il ne donnera rien volontairement, car, selon la loi du Christ qu’il professe, il ne peut pas concourir à faire le mal. En d’autres termes, les autres disent la même chose. À ceux qui possèdent quelque chose, on le leur prend par force ; ceux qui n’ont rien, on les laisse tranquilles.

— Alors, tu n’as pas payé l’impôt ?

— Non.

— Et rien ne t’est arrivé ?

— Rien.

On a établi des passeports. Tous ceux qui quittent le lieu de leur résidence sont obligés de s’en munir et de payer des droits à cet effet. Tout à coup, de divers endroits, apparaissent des hommes qui refusent de se servir de passeports et de payer les droits, affirmant que c’est inutile et qu’on ne doit pas dépendre d’un gouvernement établi seulement sur la violence. Ici encore les autorités sont impuissantes. On emprisonne ces hommes, mais on les relâche ensuite et ils vivent sans passeports.

Tous les paysans sont obligés de remplir des fonctions de police : centenier, dizainier, etc. Mais, à Kharkov, un paysan refuse de remplir cette fonction, donnant pour motif que la loi chrétienne qu’il professe défend de garrotter, d’emprisonner, de conduire d’un lieu à un autre qui que ce soit. Le même fait se reproduit à Tver, à Tambov. On injurie ces paysans, on les