Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/379

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

actuelle, nous voyons aussi que l’organisation de cette vie, si elle continue, nous perdra infailliblement ; mais en même temps nous voulons que les conditions de notre vie, — civilisation, culture, sciences, arts, — restent les mêmes, malgré les changements apportés à l’ordre des choses. C’est comme si l’homme qui habite une vieille maison où il souffre du froid et de mille incommodités, sachant qu’elle va s’effondrer d’un instant à l’autre, ne consentirait à sa reconstruction qu’à condition de n’en pas sortir, condition qui équivaudrait au refus de la reconstruire.

« Et qu’adviendra-t-il si, en sortant de la maison, je me prive de tous ses avantages et qu’on n’en construise pas une nouvelle, ou bien si elle est construite d’une autre façon et qu’il ne s’y trouve plus rien de ce à quoi je suis habitué ? » Mais, puisque les matériaux existent, puisque les constructeurs existent, tout nous fait croire que la nouvelle maison sera construite et dans de meilleures conditions que l’ancienne. En même temps il est non seulement probable, mais certain, que la vieille maison s’écroulera et ensevelira sous ses décombres ceux qui y seront restés. Que les anciennes conditions de la vie disparaissent, que de nouvelles, meilleures, s’établissent, car de toute façon il faut nécessairement abandonner les anciennes, devenues impossibles et mortelles, et marcher au-devant de l’avenir.

« Mais la science, l’art, la civilisation, tout disparaîtra ! » Mais puisque tout cela n’est que des manifestations diverses de la vérité, puisque le changement à faire a pour but de nous rapprocher de la vérité et de la réaliser. Comment donc les manifestations de la vérité pourraient-elles disparaître par suite de sa réalisation ? Elles seront autres, meilleures et supérieures, mais elles ne disparaîtront pas. Ce qui disparaîtra c’est