Page:Tolstoï - Ma religion.djvu/245

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Considérez-vous comme insensé d’aller tuer les Turcs ou les Allemands — n’y allez pas ; considérez-vous comme insensé de vous approprier par la force le travail des pauvres pour être vêtus à la mode, vous et vos femmes, ou pour organiser un salon qui vous ennuie mortellement, — ne le faites pas ; considérez-vous comme insensé d’entasser dans des prisons, c’est-à-dire de vouer à l’oisiveté absolue et à la dépravation la plus hideuse des gens déjà corrompus par l’oisiveté et la dépravation, — ne le faites pas ; trouvez-vous insensé de vivre dans l’air pestilentiel des villes, quand vous pouvez vivre dans un air pur ; trouvez-vous absurde d’enseigner à vos enfants, avant tout et par-dessus tout, les grammaires des langues mortes, — ne le faites pas. Ne faites pas, en un mot, ce que fait actuellement tout notre monde européen : — il vit et il considère sa vie comme insensée ; il agit et considère ses actes comme insensés ; il n’a pas confiance dans sa raison et vit en désacord avec elle.

La doctrine de Jésus est la lumière. La lumière luit et les ténèbres ne peuvent pas l’envelopper. On ne peut pas disputer contre elle, il est impossible de ne pas l’accepter. Il faut bien se rendre à la doctrine de Jésus qui enveloppe toutes les erreurs dans lesquelles vivent les hommes et sans entrer en collision avec ces erreurs les pénètre toutes, comme l’éther dont parlent les physiciens enveloppe le monde. La doctrine de Jésus est également inévitable pour chaque homme de notre monde, dans quelque situation qu’il se trouve. La doctrine de Jésus ne peut pas ne pas être reconnue par les hommes, non pas parce qu’on ne peut pas nier l’explication métaphysique de la vie qu’elle donne (on peut tout nier),