Page:Tolstoï - Qu’est-ce que la religion.djvu/68

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dans l’âge mûr, alors cette défiguration de son âme avec laquelle lui a été inspirée la méfiance envers sa raison, ne peut disparaître sans laisser de traces, de même que dans l’être physique l’empoisonnement de l’organisme par un poison violent ne peut se passer sans laisser de trace. En se délivrant de l’hypnose, de la tromperie, un homme pareil, qui hait le mensonge dont il vient de se délivrer, adoptera naturellement la doctrine des hommes avancés, doctrine selon laquelle chaque religion est considérée comme l’obstacle principal de la marche de l’humanité dans la voie du progrès. Et en adoptant cette doctrine, un tel homme deviendra comme ses maîtres un homme sans principes, c’est-à-dire sans conscience, qui n’a dans la vie d’autre guide que ses passions et qui non seulement ne se condamne pas pour cela mais au contraire se considère comme arrivé au point culminant du développement spirituel accessible à l’homme.

Ce sera ainsi avec les hommes forts d’esprit. Et les hommes moins forts d’esprit, même si le doute s’éveille en eux, ne se délivreront jamais complètement de la tromperie dans laquelle ils ont été élevés, et, s’associant aux diverses théories vagues, construites habilement pour justifier l’ineptie des dogmes acceptés, ou inventant des théories pareilles et vivant dans le domaine du doute, du brouillard,