Page:Tolstoï - Scenes de la vie russe.djvu/42

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série de rondelles. Elle en fut toute bouleversée ; toutefois elle se tut, de peur de se mêler d’une chose qu’elle ne connaissait pas.

L’ouvrier se mit ensuite à coudre les pièces, mais, toujours contrairement à l’usage, il semblait faire des souliers destinés à être portés à nu, comme ceux qu’on met aux morts. Matréma s’étonnait de plus en plus, et Michel cousait imperturbable. L’après-midi se passa ; quand Sema revint, le cuir de Sa Seigneurie était transformé en une paire de souliers de mort.

Le pauvre homme joignit les mains.

— Grand Dieu ! s’écria-t-il, depuis un an qu’il est chez moi, ce jeune homme n’a jamais fait la moindre bévue : faut-il que tout d’un coup il me cause un si grand dommage ! Des souliers mous, au lieu des grandes bottes commandées ! Et le cuir précieux abîmé, perdu ! Où en retrouver de pareil maintenant ? Et que vais-je dire au gentilhomme ? Qu’as-tu donc pensé, Michel, mon pauvre ami ? C’est un poignard que tu me plonges dans le sein. On te commande des bottes et tu…

Il allait éclater de colère, mais des coups re-