Page:Tolstoï Les Cosaques.djvu/199

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musique militaire parvinrent distinctement à ses oreilles ; une foule de promeneurs attira ses regards, et il se retrouva sur le boulevard comme devant, capitaine en second dans l’infanterie.


II


Il s’approcha d’abord du pavillon, à côté duquel jouaient quelques musiciens ; d’autres soldats du même régiment servaient de pupitre à ces derniers, en tenant ouverts devant eux les cahiers de musique, et un petit cercle les entourait, fourriers, sous-officiers, bonnes et enfants occupés à regarder plutôt qu’à écouter. Autour du pavillon, des marins, des aides de camp, des officiers en gants blancs se tenaient debout, assis ou se promenaient ; plus loin, dans la grande allée, on voyait pêle-mêle des officiers de toute arme, des femmes de toute classe, quelques-unes en chapeau, la plupart un mouchoir sur la tête ; d’autres ne portaient ni chapeau, ni mouchoir ; mais, chose étonnante, il n’y en avait pas de vieilles, toutes étaient jeunes. En bas, dans les allées ombreuses et odorantes d’acacias blancs, on apercevait quelques groupes isolés, assis ou en marche.

À la vue du capitaine Mikhaïlof, personne ne témoigna de joie particulière, à l’exception peut-être des capitaines de son régiment, Objogof et Souslikof, qui lui serrèrent la main avec chaleur ; mais le premier n’avait pas de gants, il portait un pantalon en poil de chameau, une capote usée, et sa figure rouge était couverte de sueur ; le second parlait trop haut, avec un sans-gêne révoltant ; il n’était guère flatteur de se promener avec eux, surtout en présence d’officiers en gants blancs ; parmi ces derniers se trouvaient un aide de camp, avec lequel Mikhaïlof échangea des saluts, et un officier d’état-major, qu’il aurait égale-