Page:Tolstoi - La Pensée de l’humanité.djvu/338

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

12. Souvent les hommes les plus simples, les moins lettrés, les moins instruits, s’assimulent facilement la doctrine chrétienne, tandis que les plus savants croupissent dans le paganisme le plus vulgaire. Cela vient de ce que les gens simples sont le plus souvent humbles, et que les savants sont pour la plupart trop surs d’eux-mêmes.

13. Pour comprendre raisonnablement la vie et la mort et attendre celle-ci en paix, il est indispensable de comprendre combien on est nul.

Tu es une parcelle infiniment petite de quelque chose, et tu ne serais rien si tu n’avais pas une mission déterminée — une œuvre. Cela seulement donne un sens et une signification à ta vie. Ton œuvre consiste à profiter des instruments qui te sont donnés, de même qu’à tout ce qui existe : d’user ton corps à ce qui t’a été recommandé. C’est pourquoi, toutes les œuvres sont égales et tu ne peux pas faire plus qu’il ne t’a été commandé. Tu ne peux être qu’adversaire de Dieu ou interprète de son œuvre. De sorte que l’homme ne peut s’attribuer rien de grand ni d’important. Il suffit de s’attribuer quelque œuvre exceptionnelle, pour qu’il n’y ait plus fin aux déceptions de la lutte, à la jalousie, aux souffrances de toutes sortes, tu n’as qu’à t’attribuer plus d’importance qu’à la plante qui donne des fruits, et tu es perdu. La tranquillité, la liberté, la joie de la vie, le courage devant la mort, ne sont donnés qu’à celui qui ne se croit dans cette vie rien de plus qu’un ouvrier de son Maître.