Page:Tolstoi - La Pensée de l’humanité.djvu/402

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consiste dans la séparation possible de l’âme du corps, et dans la faculté acquise de se concentrer en dehors du corps, en elle-même ; la mort donne cette même libération. Ne serait-il pas étrange que l’homme qui se prépare toute sa vie à vivre de façon à devenir aussi libre que possible par la domination du corps, s’en trouve mécontent au moment où cette libération est prête de se réaliser. C’est pourquoi, malgré tout le regret que j’ai de vous quitter et de vous causer du chagrin, je ne puis ne pas acclamer la mort, comme la réalisation de ce que je désirais atteindre durant toute ma vie. (Du discours d’adieu de Socrate à ses élèves.)

6. L’homme voit les plantes et les animaux s’engendrer, croître, prendre des forces, se multiplier, puis faiblir, dépérir, vieillir et mourir. Il le voit de même sur les autres hommes, et il le sait également que son corps vieillira, qu’il dépérira et mourra, comme tout ce qui naît et vit au monde. Mais, en dehors de ce qu’il voit sur les autres êtres et sur lui-même, tout homme sait aussi qu’il y a quelque chose en lui qui ne faiblit ni ne vieillit ; il sait, au contraire, que plus il vit, plus ce quelque chose se fortifie et se perfectionne : c’est son âme à laquelle rien ne peut arriver de ce qui arrive au corps. C’est pourquoi la mort n’effraie que celui qui ne vit pas de l’âme, mais du corps.

7. On demanda à un sage qui disait que l’âme était immortelle : « Qu’est-ce qui arrivera lorsque le monde