Page:Torcy (Blieck) - L'exode, 1919.djvu/153

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
152
L’EXODE

afin d’épargner les munitions. Par impatience, une balle partit trop tôt, culbuta le premier uhlan, ce qui permit aux autres de tourner bride.

— Mais, s’écria le médecin, ils seront allés chercher du renfort !

— Et nous tomberons en pleine algarade ! ajouta Philippe.

— Que voulez-vous ! objecta Sylvain, il faut cependant soigner ce blessé.

Le temps parut long ; Cocotte elle-même, vaincue de chaleur et de fatigue, encensait de la tête et se refusait à trotter.

Philippe inquiet interrogeait la campagne, croyant voir des ombres suspectes à tous les points de l’horizon.

Comme on approchait du croisement de deux routes, le médecin arrêta son cheval : un tourbillon de poussière grise roulait en s’allongeant sous les arbres, et l’on crut à une chevauchée de uhlans.

— Bigre ! dit Sylvain, qui demeura un moment indécis.

Bientôt, pareil à un obus émergeant de sa fumée, une auto jaillit entre les troncs des peupliers. On aperçut à la portière un bras secouant un mouchoir, et, sur le moteur, un drapeau d’ambulance qui claquait au vent.

Au carrefour des deux routes, l’auto s’arrêta, le chauffeur ouvrit la portière, et l’on vit une femme descendre et faire signe au médecin, en élevant son mouchoir.