Page:Toulet - Béhanzigue, 1921.djvu/131

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LE BEAU FUSCHIA

La modiste honoraire, ce soir-là, unissait, sur son corps, comme une double pourpre, le rouge au violet. Sa jupe, du plus riche et sombre améthyste, faisait des plis mous et luxurieux sur la cambrure ou les retraits de son corps, corselé de soie aubergine, — mais que voilait mal, un peu plus haut, une fanchon de mousseline rubis. Et l’or vierge de ses cheveux, ramassés et pendants sur la nuque, jetait de pâles éclairs.

On entra, au sortir du théâtre, dans un restaurant de nuit, tout miroitant de lampes, et Lœtitia, reprenant le dialogue où on l’avait laissé :

— C’est comme ce Beardsley, dit-elle, où vous m’avez menée, l’autre jour, boulevard Malesherbes. Encore un de ces étrangers, qu’il faut se traduire à coups de dictionnaire. Moi j’y comprends rien. Je suppose que c’est de la mythologie.

— À part que ses modèles sont un peu trop vêtus…

— Trop vêtus ! Peste, mon cher, qu’est-ce qu’y vous faut ?

— Mais enfin, Lœtitia, les déesses de la Fable, vous en conviendrez, sont peintes le plus souvent sans chemise. Tandis que les « belles » d’Aubrey Beardsley en ont — un peu ouvertes — et des corsets, des loups, — que sais-je encore ? — des manchons, des éventails, de quoi aller dans la rue, enfin.

— Sans quitter le trottoir…