Page:Tourgueneff - Récits d un chasseur, Traduction Halperine-Kaminsky, Ollendorf, 1893.djvu/262

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et de résine, de beurre et de chanvre et cent autres choses encore. Il est habile, très habile ! et riche ! Ah ! l’animal ! Mais il a la rage de frapper, voyez-vous. Ce n’est pas un homme, c’est un chien, ou plutôt… en un mot, c’est un fauve.

— Pourquoi les moujiks ne se plaignent-ils pas de lui à leur vrai seigneur ?

— Ah ! oui ! Qu’est-ce que ça lui fait, à lui ? pourvu qu’il touche son revenu !… Que lui faut-il de plus ? Et puis, essaye donc, ajouta-t-il après un court silence. Plains-toi. Oh ! alors, tu verras ! Non, il te fera… Voilà comment !…

Je me rappelai Anthippe, et je racontai brièvement ce que j’avais vu.

— Eh bien, à présent, dit Anpadiste, Sofron mangera le vieux, il le mangera tout à fait… Et savez-vous pourquoi il lui en veut tant ? À la réunion du village, Anthippe n’y pouvant plus tenir s’est querellé avec le bourmistre, et c’est depuis… Le starost l’assommera… Ah ! le pauvre homme ! et à présent ils vont l’achever. Sofron sait à qui il s’attaque, ce chien ! Dieu me pardonne ! Il laisse tranquille les riches, mais là il avait beau jeu. Vous savez qu’il a pris pour le recrutement, sans égard au tour de rôle, deux des fils d’Anthippe ?

Nous nous mîmes à chasser.