Page:Tourgueneff - Récits d un chasseur, Traduction Halperine-Kaminsky, Ollendorf, 1893.djvu/289

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qu’il faut procéder. Les cris et les injures n’avancent à rien. Nikolaï Eréméitch, dites-moi plutôt pourquoi vous me persécutez, pourquoi vous voulez me perdre, hein ? Dites-moi, parlez.

— Ce n’est pas ici le lieu de nous expliquer, dit le chef de bureau non sans agitation, et l’heure est mal choisie. Je m’étonne seulement que vous vous soyez si bizarrement persuadé que je vous persécute : car enfin, que puis-je donc contre vous ? Vous n’êtes pas attaché au comptoir.

— Comment donc ! répondit Pavel, il ne manquerait plus que cela ! Mais pourquoi donc tant de détours, Nikolaï Eréméitch. Vous me comprenez bien.

— Non, je ne vous comprends pas.

— Si fait, vous me comprenez !

— Nullement, je vous le jure !

— Il jure encore ! Allons, vous ne craignez donc pas Dieu ? Pourquoi persécutez-vous cette pauvre fille ? Que voulez-vous ?

— De quelle fille parlez-vous, Pavel Andreitch ? dit mon hôte avec un étonnement feint.

— Hé ! vous ne le savez peut-être pas ? Je parle de Tatiana. Qu’est-ce qu’elle vous a fait ? N’avez-vous pas honte ? un homme marié qui a des enfants grands comme moi !… Et moi,