Page:Tourgueniev - Fumée.djvu/88

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toujours immobile et semblait attentive moins à ce qu’il lui disait qu’à je ne sais quelles paroles intérieures, — mais vous ne vous refuserez pas à accepter de moi ces fleurs.

Il lui offrit un bouquet d’héliotropes.

Elle jeta sur Litvinof un regard rapide, tendit la main, et saisissant le bout de la branche qui ornait sa tête, elle lui dit :

— Veux-tu ? dis seulement un mot, j’arracherai tout cela et je resterai à la maison.

Litvinof sentit son cœur bondir. Irène arrachait déjà la guirlande…

— Non, non, pourquoi cela ? dit-il précipitamment, — je ne suis pas égoïste, pourquoi se priver… lorsque je sais que ton cœur ?…

— Alors n’approchez pas, vous chiffonneriez ma robe, répondit-elle à la hâte.

Litvinof se troubla.

— Vous prendrez le bouquet ? demanda-t-il.

— Sûrement, il est ravissant et j’aime beaucoup cette odeur. Merci, je le conserverai en souvenir…

— De votre première sortie, de votre premier triomphe.

Irène se regarda dans la glace par dessus l’épaule de Litvinof en s’élevant à peine sur la pointe de ses pieds.

— Est-ce que je suis vraiment si belle ? N’êtes-vous pas trop galant ?

Litvinof se confondit en louanges exaltées, mais Irène ne l’écoutait déjà plus et, approchant le bou-