Page:Tournefort Voyage Paris 1717 T2.djvu/208

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livres de son Histoire pour y traiter celle d’Heraclée, est du sentiment de Justinien. Memnon, pour marquer le caractere de Satyrus, dit qu’il ne surpassoit pas seulement son frere en cruauté, mais encore tous les autres tyrans qui étoient au monde. Attaqué d’un cancer qui lui devora tout le bas ventre jusqu’aux entrailles, aprés avoir souffert autant qu’il le meritoit, il se déchargea du soin des affaires sur Timothée son neveu la 65 année de son âge, et la septiéme de son regne.

Timothée répondit parfaitement à son nom, et fut un Prince accompli dans la paix et dans la guerre ; aussi merita-t-il le nom de Bienfaiteur, et de Sauveur de sa patrie. Avant sa mort il associa au Gouvernement son frere Denys, lequel profitant de la retraite des Perses qu’Alexandre venoit de battre à la bataille du Granique, étendit assez loin les limites du Royaume d’Heraclée. Aprés la mort d’Alexandre et de Perdiccas, Denys épousa Amastris fille d’Oxathre frere de Darius, et coufine de cette belle Statira qui avoit merité d’avoir Alexandre pour mari. Alexandre même avoit pris soin, avant que de mourir, de marier Amastris à Craterus l’un de ses Favoris, lequel ensuite devenu amoureux de Philas fille d’Antipater, ne trouva pas mauvais qu’Amastris, ou Amestris selon Diodore de Sicile, épousât Denys. Ce Prince étoit un honnête homme qui quitta le nom de tyran pour prendre celui de Roy, qu’il soutint avec beaucoup de grandeur : et c’est sans doute de ce Roy dont parle Strabon, lorsqu’il assûre qu’il y eut des Tyrans et des Roys d’Heraclée. Le Roy Denys devint si gros et si gras parmi tant de félicitez, qu’il tomba dans une espece de léthargie, dont on avoit même de la peine à le faire revenir, en lui enfonçant des aiguilles bien avant dans les chairs. Nymphis attribuoit cette maladie à Clearque, fils du premier tyran