Page:Tourneux - La Bibliothèque des Goncourt, 1897.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ratures comme celle que Mme Commanville a détachée du manuscrit de Madame Bovary, ou comme celle des Souvenirs de Jeunesse d’Ernest Renan ; d’autres, au contraire, ont été calligraphiées postérieurement à la gestation de l’œuvre, comme le passage de Nana recopié par M. Zola (le texte primitif s’étant perdu aux mains des typographes), ou comme celui des Diaboliques tout rutilant d’encre rouge, sablé de poudre d’or et paraphé d’une flèche.

En tête de Ma Jeunesse par Michelet est reliée une composition française du collégien, corrigée et apostillée par Villemain d’un encouragement flatteur. L’écrivain du siècle qui a le plus remanié et retouché ses livres et dont chaque réimpression, exécutée de son vivant, constitue en quelque sorte un texte nouveau, Balzac est ici au grand complet, ou peu s’en faut, et même plus qu’au complet, puisque voici l’exemplaire d’épreuves des Martyrs ignorés, provenant de Dutacq, et portant des corrections qui ne se retrouvent pas toutes dans les éditions définitives.

Plus récemment, Edmond de Goncourt imagina pour les livres de ses amis ou de ses disciples préférés un raffinement nouveau. L’autographe tout meurtri encore, si l’on peut dire, de la lutte entre la pensée et sa traduction graphique ne lui suffit plus ; il voulut retrouver en tête de chacun de ces livres un reflet de la personnalité même de leurs auteurs ; mais il lui fallait plus et mieux qu’une épreuve de choix d’un portrait gravé. À peine ce caprice exprimé, peintres et écrivains rivalisèrent de zèle pour le satisfaire : en moins de quatre ans, une nouvelle vitrine du grenier s’est enrichie de toute une série de volumes habillés par le successeur de Pierson d’un vélin immaculé où sont fixés à l’huile, à la gouache et à l’aquarelle les traits et les attitudes des familiers des récentes années ou d’amis plus anciens, dont quelques-uns, comme Théo-