Page:Tremblay - Les ailes qui montent, hommage au nouvel an 1919, 1918.djvu/23

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Vivants crucifiés dans leur maison qu’on brûle,
Ou fusillés au mur comme belligérants
Par l’État-Major ivre en conciliabule ;
Puis, dans l’humble foyer où les parents sont nés
— Quand fuient les officiers que l’alerte déloge —
S’agrandir aux regards des maîtres étonnés,
Le vide, dans un coin où cliquetait l’horloge ;
Qu’elles ont vu, partout, rugir l’assassinat
Des blessés qu’on achève et des femmes qu’on souille,
Des brancardiers portant leur brassard incarnat,
Et des cercueils muets que la démence fouille ;
Qu’elles ont vu passer, dans l’éclair des obus,
Le blasphème insolent qui frappe les églises,
Qui raye du fronton le « Pax ominibus ! »
Et trace un long chemin de sanglantes balises,
Où l’avenir vengeur suivra dans ses excès,
L’ivresse de Satan et l’aveu de ses crimes.
Le fer, le sang, le feu, rongent comme un abcès
Ce sol, mais devant lui, les larmes se compriment.
Et s’ils ne pleurent pas, les bleuets et poilus,
Ils savent que demain, au delà de la Meuse,
D’autres pleurs couleront, que n’aura pas voulus,
En imitant Judas, l’Allemagne écumeuse.
Ils savent que le cri : « Deutschland über alles ! »
Lancé par tout un peuple, est un cri de défaite
Ayant pour auteur Goethe et Méphistophélès ;